Chapitre 1 - Le Souffle de l'Avenir

En l’an 2147, vingt ans après la conclusion des premières aventures d’Achronia et de Terrania, Sylvie, haute-elfe désormais pleinement consciente de son héritage unique, se tient au cœur de la forêt sacrée d’Yseldra sur Achronia. Les rayons dorés du soleil matinal percent les feuillages denses, caressant son visage alors qu’elle célèbre son anniversaire de majorité elfique, un rite solennel marquant son entrée dans l’âge adulte. Autour d’elle, les chants mélodieux des elfes s’élèvent, mêlés au son cristallin des harpes et au parfum sucré des fleurs de luméline.

À ses côtés, Amélie, sa mère, rayonne de fierté, ses yeux émeraude brillant d’une tendresse protectrice. Lilia, sa tante intrépide, lance un sourire malicieux tout en ajustant une couronne de lianes tressées sur la tête de Sylvie. Les deux sœurs échangent des regards complices, conscientes que ce jour marque non seulement un tournant pour Sylvie, mais aussi une nouvelle étape pour les relations entre Achronia et Terrania. Pourtant, malgré la chaleur des festivités, l’esprit de Sylvie s’échappe vers des horizons lointains, bien au-delà des cieux d’Achronia.

Sylvie

Alors que les rires emplissent l’air et que les anciens entament un récit des exploits passés, Sylvie sent une énergie vibrer en elle, un mélange de magie elfique et d’une intuition presque scientifique héritée de son père, Skarn. Elle repense aux histoires des vaisseaux spatiaux construits au Dock Eldoril, des machines nées de l’union entre la technologie de Terrania et la sagesse elfique d’Achronia. Une pulsation sourde, comme un appel, résonne dans son cœur : l’espace, ses mystères, ses promesses de découvertes. Elle jette un regard vers le ciel, où les étoiles, invisibles dans la lumière du jour, semblent l’attendre.

Amélie (mère de Syvlie)

Soudain, Amélie pose une main douce sur son épaule. « Ma fille, aujourd’hui est ton jour. Mais je vois dans tes yeux que ton cœur est déjà ailleurs. » Lilia rit doucement et ajoute : « Ne me dis pas que tu rêves encore de ces boîtes de métal volantes ! Achronia a tant à t’offrir, petite étoile. » Les paroles des deux elfes sont empreintes d’amour, mais Sylvie sent une impatience grandissante. Ce rite, aussi sacré soit-il, n’est qu’une étape. Son destin, elle le sait, l’attend parmi les astres.

Lilia (tante de Sylvie)

Au loin, un bourdonnement discret interrompt les festivités. Un messager elfe, vêtu d’une tunique argentée, s’approche rapidement, un cristal de communication scintillant dans sa main. Il s’incline devant Aldarian, le roi elfe, qui observe la scène depuis une estrade ornée de runes. « Majesté, un message urgent du Dock Eldoril. Les ingénieurs de Terrania rapportent une avancée majeure sur le vaisseau Éclatmaris. Ils requièrent la présence immédiate d’un représentant d’Achronia pour valider les nouveaux systèmes. Ils insistent sur un besoin spécifique de connaissances en magie elfique pour stabiliser le cœur du réacteur. »

Un silence soudain tombe sur la clairière. Les chants s’estompent, les harpes se taisent. Tous les regards convergent vers Sylvie. Ses yeux verts s’illuminent comme deux étoiles naissantes. Elle sent son cœur battre à l’unisson du mot Éclatmaris, ce vaisseau qu’elle a suivi en secret pendant des années, ce rêve qu’elle porte en elle depuis l’enfance.

Aldarian se lève lentement, sa cape brodée d’argent flottant derrière lui. Il pose son regard sage sur la jeune haute-elfe. « Le choix est évident. Personne ici ne maîtrise mieux que toi la fusion entre magie et technologie, Sylvie. Veux-tu être celle qui représentera Achronia à bord de l’Éclatmaris ? »

Un sourire éclatant illumine le visage de Sylvie. Sans la moindre hésitation, elle bondit sur place, les bras levés vers le ciel comme si elle voulait déjà saisir les étoiles. « Oui ! Mille fois oui, Majesté ! Je suis prête, je pars tout de suite ! » Sa voix résonne dans la clairière, plus forte que les chants qui reprennent timidement.

Amélie serre doucement la main de sa fille, les yeux brillants de larmes contenues. « Je viens avec toi, ma lumière. Pas question de te laisser seule là-haut. » Lilia éclate de rire et tape dans ses mains. « Enfin une aventure digne de ce nom ! Je prépare mes flèches, on ne sait jamais ce qui traîne dans l’espace. »

Aldarian hoche la tête avec bienveillance, déjà penché sur un parchemin runique qu’un scribe lui tend. D’un geste élégant, il y appose le sceau royal d’Achronia et signe l’ordre de mission. « Que l’Éclatmaris porte notre espoir au-delà des cieux. Sylvie et Amélie représenteront notre peuple. » Le cristal de communication est aussitôt transmis à Sylvie, qui le serre contre son cœur comme un trésor.

La fête reprend de plus belle, plus joyeuse encore. Les coupes de nectar de luméline circulent, les harpes vibrent, et les anciens, encouragés par l’enthousiasme général, se lancent dans le récit des grandes aventures passées. On parle de la Pierre de Thrain, des Dravika, de la traversée des failles, du coup d’État humain, de la libération de Lilia, de la construction de l’Éclatmaris, des fragments d’héritage, de la reine Gloriana… Chaque histoire fait briller les yeux de Sylvie un peu plus fort.

Autour du feu central, Lilia mime avec exagération comment elle a terrassé un orc d’un seul tir d’arc, Galdor – venu spécialement pour la cérémonie – lève sa chope en grognant que sans les alliages nains le vaisseau ne tiendrait pas une seconde, et Amélie raconte doucement comment Skarn lui avait appris à lire les étoiles sur le toit d’un immeuble de Terrania. Les rires fusent, les souvenirs se mêlent, et la nuit s’emplit de promesses.

Au milieu de tout cela, Sylvie lève sa coupe vers le ciel désormais constellé. Dans son cœur, une seule pensée : demain, elle montera à bord de l’Éclatmaris. Demain, l’espace l’attend.

Au lever du soleil suivant, la clairière d’Yseldra est encore endormie sous la rosée quand Sylvie, Amélie et Lilia franchissent le grand portail ancestral en compagnie du messager Altrion et de trois érudits de Valandor : Maelys, Elandor et la jeune Naelia, porteuse de la sacoche de fioles.

Maelys
Elandor
Naelia
Galdor

Une navette les dépose sur la plateforme terrestre du Centre Spatial Guyanais. Une navette spatiale les attend déjà, moteurs ioniques allumés. Vingt minutes plus tard, elle les dépose en douceur sur le Dock Eldoril, immense anneau gravitationnel où l’Éclatmaris flotte, ses runes pulsant comme un cœur géant.

Dans la salle des machines, les deux prototypes s’opposent toujours. Le Cœur d’Éther elfique tremble, ses douze spirales magiques désaccordées. Les fioles de magie pure s’épuisent trop vite. La Voile de Lumière Mark VII humaine, elle, attend patiemment, encore enroulée.

Galdor grogne, Henri soupire. Sylvie reste en retrait, les yeux écarquillés, observant chaque geste de sa mère. Amélie s’approche du cristal, effleure la surface froide. Elle ferme les yeux, écoute la vibration chaotique des spirales comme une musique brisée. Puis, d’un mouvement fluide, elle brise une fiole vide contre le sol, laisse la magie pure s’élever en volutes argentées et trace dans l’air la rune du nœud de Möbius inversé. Les douze spirales se relient en une seule boucle infinie.

Le cristal passe instantanément du rouge au bleu profond. Les oscillations s’arrêtent. Flux stable à 99,997 %. Adrien siffle. « Elle a créé une boucle auto-alimentée… plus besoin que d’une fiole toutes les 36 heures ! »

Sylvie regarde sa mère avec une admiration sans bornes, les larmes aux yeux. « Maman… comment tu as fait ça ? » Amélie sourit doucement, pose une main sur l’épaule de sa fille. « Tu apprendras, ma lumière. C’est juste une question d’écoute. » Galdor tape dans ses mains. « Proxima en neuf ans ! On a notre propulsion hybride ! »

Le vaisseau est prêt. L’équipage est choisi. La destination est validée.

Henri (58 ans)

Au fil des jours suivants, Sylvie se voit confier des responsabilités croissantes au sein de la mission. Elle supervise les calibrages finaux du Cœur d’Éther, utilisant son intuition unique pour ajuster les flux magiques aux systèmes humains. Les ingénieurs la consultent pour chaque anomalie, et elle propose des solutions hybrides qui fusionnent la télépathie elfique avec les algorithmes de diagnostic automatisés. Bientôt, elle devient la co-responsable de la section propulsion, aux côtés de Galdor, le chef mécanicien nain, dont la voix bourrue résonne dans les hangars tandis qu’il dirige les équipes avec une précision infaillible.

Un soir, dans la salle de contrôle du Dock Eldoril, Amélie prend Sylvie à part, ses yeux verts brillant d’une émotion contenue. « Ma fille, cette mission est ton aventure maintenant. J’ai vu les étoiles dans tes yeux depuis ton enfance. Il est temps pour toi de voler seule. Je retourne sur Achronia pour veiller sur notre peuple, mais mon cœur sera avec toi. » Elle serre Sylvie dans ses bras avant de franchir le portail, laissant derrière elle un pendentif magique qui pulse doucement au rythme de leur lien télépathique.

Henri, à 58 ans, annonce sa retraite lors d’une cérémonie simple sur le dock. Ses cheveux grisonnants et son regard fatigué mais serein trahissent les années passées à concevoir des merveilles technologiques. « J’ai donné ma vie à ces machines. Maintenant, je reste sur Terrania avec ma femme et mes deux enfants. L’avenir est entre de bonnes mains. » Il serre la main de Galdor avant de partir, laissant le nain grogner un au revoir bourru tout en continuant à superviser les derniers ajustements sur l’Éclatmaris.

Galdor, avec sa barbe tressée de fils d’argent et son marteau enchanté toujours à la ceinture, s’impose naturellement comme le pilier mécanique du vaisseau. Il part avec Sylvie, ses outils nains gravés de runes anciennes prêts à affronter les rigueurs de l’espace. Parmi les érudits elfes, Naelia, avec ses longs cheveux noirs cascadant comme une nuit étoilée et sa tenue légère de soie fluide ornée de motifs stellaires, exprime son désir ardent de rejoindre l’aventure. « L’univers m’appelle, comme il appelle Sylvie. Laissez-moi embarquer ! » Son enthousiasme contagieux lui vaut une place à bord, tandis que Maelys et Elandor restent sur le dock pour collaborer avec les humains de Terrania.

Les deux érudits se consacrent à la conception de machines à énergie, partageant les secrets elfiques pour capter l’énergie solaire. Leur objectif à moyen terme, sur 100 à 200 ans – une brève période pour les elfes mais un défi pour les humains – est de bâtir une sphère de Dyson autour du Soleil, une structure colossale capable d’exploiter toute l’énergie stellaire. Pour l’instant, ils se concentrent sur des panneaux solaires avancés, déployés en orbite proche du Soleil, où des enchantements elfiques protègent les matériaux contre la chaleur extrême, augmentant le rendement de 40 % par rapport aux technologies pures humaines.

L’équipage humain embarque ensuite : 150 personnes sélectionnées pour leurs compétences variées. Parmi eux, des ingénieurs structurels comme Adrien, chargés de maintenir l’intégrité du vaisseau face aux contraintes relativistes ; des biologistes exobiologistes, spécialisés dans la recherche de vie extraterrestre, armés de sondes génétiques pour analyser les biosignatures potentielles sur les exoplanètes de Proxima Centauri ; des astrophysiciens modélisant les anomalies gravitationnelles pour optimiser la trajectoire, utilisant des simulations quantiques pour prédire les interactions avec les champs magnétiques stellaires.

D’autres métiers complètent l’équipe : des psychologues interstellaires pour gérer les effets du confinement prolongé ; des agronomes hydroponiques pour cultiver des jardins elfico-humains en apesanteur, combinant lembas enchantés avec des cultures accélérées ; des cryptographes cosmiques, prêts à décoder d’éventuels signaux aliens en croisant algorithmes humains et divination elfique ; et des artistes holographiques pour documenter le voyage, créant des archives immersives qui fusionnent réalité augmentée et illusions magiques.

La cohérence scientifique de la mission repose sur une planification méticuleuse : des sondes préliminaires lancées par la Voile de Lumière cartographieront Proxima b et c, évaluant leur habitabilité via spectroscopie atmosphérique pour détecter ozone, méthane ou oxygène. L’Éclatmaris emporte des rovers enchantés, capables de résister à des températures extrêmes grâce à des boucliers magiques, et des laboratoires modulaires pour analyser in situ des échantillons de glace ou de roche, cherchant des traces de vie microbienne ou de minéraux interdimensionnels.

Les humains sont placés en cryogénie, leurs corps suspendus dans des capsules elfiques infusées de sève régénérante, pour se réveiller neuf ans plus tard sans vieillir, préservant leur espérance de vie limitée. Sylvie, Galdor et Naelia restent éveillés, le temps coulant différemment pour eux : pour les immortels elfes et les robustes nains, neuf ans ne sont qu’une saison dans une vie éternelle, une opportunité pour méditer, réparer et rêver aux étoiles qui approchent.

Avec le vaisseau paré, les amarres larguées, l’Éclatmaris s’élance dans le vide, son réacteur hybride ronronnant comme un chant ancestral. La mission vers Proxima Centauri commence, porteuse d’espoirs intermondiaux.

Avec l’Éclatmaris comme vaisseau commandant, la mission vers Proxima du Centaure s’étend à une flotte de quatre navires, chacun conçu pour un rôle complémentaire dans cette odyssée interstellaire.

Le premier ajout est un vaisseau colon massif de cinq kilomètres de long, chargé de réserves massives : semences enchantées, artefacts nains pour terraformer, et modules habitables pour 10 000 colons. Une fois posé sur un monde viable, il se déploiera en une cité permanente, ses réacteurs se convertissant en générateurs planétaires, ancré pour toujours comme le cœur d’une nouvelle civilisation.

Le second vaisseau, l’Aigle vengeur, est une forteresse militaire escorteuse, équipée de baies latérales pour déployer des chasseurs stellaires hybrides – des engins propulsés par des cristaux de mana pour des manœuvres ultra-rapides. Ses canons à particules enchantées et ses boucliers runiques protègent la flotte contre les débris cosmiques, les anomalies gravitationnelles ou d’éventuelles menaces inconnues, assurant une défense impénétrable pendant le voyage.

Le dernier, l’Arboria, est dédié à la sustenance éternelle. Son vaste dôme abritent des cultures hydroponiques elfiques qui fusionnent avec des systèmes de recyclage humains. Des lembas optimisés et des nutriments magiques garantissent une production continue de nourriture, capable de nourrir des milliers pendant des siècles, transformant le vide spatial en un jardin flottant.

Alors que la flotte s’aligne en formation delta, Sylvie observe depuis le pont de l’Éclatmaris, les étoiles scintillant comme des promesses. Amélie, avant son départ définitif par le portail, avait murmuré à son oreille : « C’est ton aventure, ma fille. Ces vaisseaux portent les rêves de deux mondes, mais c’est ton esprit qui les guidera. » Les mots résonnent encore tandis que Galdor ajuste les commandes, et Naelia vérifie les serres.

La flotte accélère, le Cœur d’Éther ronronnant en harmonie, prête à affronter l’inconnu. Proxima Centauri n’est plus un rêve lointain, mais une destination tangible, avec des mondes potentiels à coloniser si l’Arboria Eternal trouve un havre viable.